Exposition aux PCB, le principe de précaution doit prévaloir

Exposition aux PCB par la consommation de poissons fortement contaminés :
le principe de précaution doit prévaloir.

 

Jeudi 2 février 2012, le Courrier Picard a publié un article de deux pages sur l’étude de l’Agence de Sécurité Sanitaire (Anses) relative à l’imprégnation en polychlorobiphényles (PCB) des consommateurs de poissons d’eau douce proches des sédiments (anguilles, carpes,…). Bien que l’Anses recommande de ne pas consommer ces aliments en provenance des sites picards pollués, l’article, intitulé « Le poisson aux PCB est sans danger à petites doses » pourrait laisser croire que le risque lié à la consommation de ces poissons est faible. François Veillerette, spécialiste de la question des pesticides fait un point précis des dangers des PCB.

Les PCB constituent une famille de 209 molécules différentes. Ce sont des composés chlorés considérés comme des polluants organiques persistants  (POPS) dont la Convention de Stockholm prévoit l’élimination.

Ce types de polluants a en effet la capacité de ne se dégrader que très lentement dans l’environnement, de se concentrer dans les chaines alimentaires et de se concentrer dans les graisses perturbateurs des consommateurs des animaux les plus contaminés, ce qui est le cas de l’homme. On les trouve ainsi dans des poissons vivant dans des milieux particulièrement pollués mais aussi les poissons gras, des produits laitiers  ou carnés.

Les PCB sont des perturbateurs endocriniens (PE), c’est-à-dire qu’à très faible dose ils ont la capacité de perturber le système hormonal. Ils sont ainsi soupçonnés d’avoir des propriétés anti-oestrogéniques ou encore d’altérer la fonction thyroïdienne.

Les conséquences[1] de cette perturbation peuvent apparaître plus tard dans la vie d’un fœtus exposé in utéro et prendre la forme de problèmes de développement, l’augmentation de certains cancers, des altérations du système immunitaire ou encore des troubles du comportement ou du métabolisme. Ces phénomènes de perturbation endocrinienne peuvent intervenir à des doses très faibles et les effets ne sont souvent pas proportionnels à la dose, c’est-à-dire que l’on peut avoir des effets plus importants à faible dose qu’à forte dose.

De plus l’exposition alimentaire des populations aux perturbateurs endocriniens est importante et multiple. Une enquête[2] réalisée sur les repas d’une journée en 2010 a ainsi montré que ces repas exposaient le consommateur à 37 perturbateurs endocriniens différents et pour une seule journée ! Des effets de synergie entre les différentes substances PE peuvent exister. Il est ainsi très téméraire de vouloir définir à priori une dose sûre d’exposition pour ce type de molécule.

La règle devrait être de limiter l’exposition  des consommateurs au maximum, et particulièrement des femmes enceintes puisque c’est le fœtus en développement qui est le plus à risque des conséquences de ces PE.  Par ailleurs et toujours avec le soucis de prévenir l’apparition de pathologies chroniques sur le long terme, il faut rappeler que les PCB sont classés comme des cancérigènes probables par le Centre International de recherche sur le Cancer ( CIRC) et que le PCB 126 est même classé comme cancérigène certain ! Alors que le cancer constitue une véritable épidémie dans notre pays (365 000 nouveaux cas en 2011 !) et particulièrement dans notre région nous pensons qu’il faut limiter au maximum l’exposition des consommateurs aux PCB pour cette raison.

Pour toutes ces raisons la situation de pollution des sédiments de nombreux cours d’eau picards ne doit pas être prise à la légère. Le récent rapport[3] de l’ANSES ne doit en aucun cas conduire à relâcher la très grande prudence qui doit s’imposer en matière de consommation d’aliments contaminés par des PCB ou autres POPS. La règle en la matière est simple : il faut limiter l’exposition à ces substances au maximum, spécialement pour la femme enceinte et le jeune enfant, particulièrement à risque.

 


[1]Voir le récent rapport de l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques  et Techniques : http://www.cancer-environnement.fr/LinkClick.aspx?fileticket=bNVZGazp-Ek%3d&tabid=274&mid=1548

[3] http://www.anses.fr/Documents/PASER2010sa0416Ra.pdf

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